INTERVIEW - 69 Chambers (2010)

Mené par la charismatique et très sexy Nina, 69 Chambers est l’un de ces groupes fort prometteurs que l’on voit surgir parfois ici et là. Composé de trois musiciens, le groupe accueille également dans ses rangs, le temps de certains concerts, un invité de marque en la personne de Tommy Vetterli (ex-Coroner). Loin de vouloir mettre ceci en avant, 69 Chambers essaye de s’imposer en tant qu’entité propre, avec ses sonorités et sa manière d’appréhender la musique. Transit a profité du passage du groupe à Yverdon pour en savoir plus en échangeant avec la guitariste, chanteuse, leader et ‘Patronne’ du groupe : Nina.





- J’ai lu que vous aviez eu beaucoup de changements de line-up dans le groupe depuis le début. Saurais-tu dire pourquoi il y a eu autant de mouvement ?

Quand j’ai commencé, c’était surtout un hobby. Au début, je jouais de la basse, instrument pour lequel je n’avais jamais pris de cours. Puis je me suis mise à la guitare, là aussi sans jamais avoir pris de cours. Quand j’ai changé d’instrument, j’ai eu vraiment envie de commencer quelque chose de sérieux, que le groupe se mette en route. Les deux gars avec qui j’avais démarré n’étaient pas ambitieux du tout, ils ne voulaient pas répéter, ne voulaient pas investir d’argent dans le projet, j’ai donc dû dégoter des gens plus motivés. Mais c’était tellement difficile de trouver des gens ! J’avais mes propres idées, mais j’aime que les gens viennent vers moi avec des propositions et c’est très difficile de trouver des gens motivés qui partagent mes visions. Donc il y a eu beaucoup de changements, pas seulement parce que je leur disais, entre autres, qu’ils n’étaient pas assez bons, mais également parce qu’ils me disaient des trucs du genre que leur copine était aussi importante, etc. Ça n’était vraiment pas évident.

- Donc ces changements n’ont aucun lien avec le fait que tu passes pour une dictatrice dans le groupe ?

(Rires) Tu dois demander aux autres membres du groupe si je suis une dictatrice. Je pense que je peux être très… (silence). Diego (le batteur) m’appelle ‘La Patronne’, mais je ne pense pas être si méchante que ça. Tous les groupes ont un leader je pense, une personne qui décide, qui écrit la plupart des morceaux, qui organise les choses, c’est normal non ?

- Oui, mais ce qui est surprenant dans ton cas, c’est que pour disons nonante-neuf pour cent des groupes, celui que tu appelles le leader est un homme, dans ce milieu c’est un peu inattendu qu’une fille prenne les commandes.

Fuck that ! Je veux dire que ça n’a pas d’importance.

- Pourquoi n’avoir pas essayé de créer un groupe totalement féminin ?

Je n’ai jamais été intéressée par ceci. Quand j’ai commencé, c’était avec des mecs. J’ai toujours voulu jouer avec les meilleurs musiciens possible, peu importe que ce soit des gars ou des filles. Tu sais jouer d’un instrument, tu partages les mêmes idées musicales, alors go, allons-y, peu importe que tu sois un mec ou une nana. C’est une pure coïncidence que Maddy, ma bassiste, nous ait rejoints. Avant elle, les autres membres du groupe étaient tous des mecs. Si j’avais trouvé une batteuse qui m’avait impressionnée avec son jeu, alors je l’aurais prise, mais ça n’a jamais été le cas.

- Tu penses que ça peut ouvrir des portes d’avoir des filles dans un groupe en Suisse ?
Je sais que parfois ça peut aider dans d’autres pays car les labels aiment bien avoir dans leurs écuries des groupes différents, que ce soit au niveau musical ou à cause des membres qui les composent. Et un groupe avec une fille comme leader, on n’en voit pas tous les jours, quand même.
Je ne sais pas, je pense que ça doit être la même chose partout. Je ne veux pas commencer à me plaindre et sortir des trucs du genre : ‘c’est parce que nous sommes un groupe à chanteuse que nous n’avons pas de succès’ et blablabla… Par contre c’est vrai que ce milieu n’est pas toujours tendre avec les filles, surtout quand tu commences à t’habiller de façon féminine, avoir l’attitude d’une fille... Tout d’abord tu n’es pas prise au sérieux. Beaucoup de gens te disent que tu es juste là pour te montrer, parce que tu veux avoir l’air sexy, et se fichent complètement de ton niveau de jeu. On est confrontés à beaucoup d’a priori. Mais je pense que généralement, on leur montre qu’ils ont tort.

- Quelle est la signification de 69 Chambers ?

Question suivante (rires) !

- Ok, tant pis, j’aurais essayé, de toute façon je connais la réponse (rires).
(Eh non, vous ne saurez rien, il ne vous reste plus qu’à faire marcher votre imagination et chercher la réponse sur le net). Bon, allez, reprenons sérieusement, ça n’a pas dû être facile pour une bassiste sans expérience de devenir une guitariste leader qui compose ses morceaux. Combien de temps ça t’a pris ?
Environ deux ans. Le niveau et la qualité n’étaient pas au top au début, je suis vraiment contente d’avoir attendu si longtemps avant d’avoir enregistré le premier album parce qu’autrement la qualité n’aurait pas été au rendez-vous. Ça a donc pris du temps.

- En tant que nouveau groupe, il est toujours difficile de réussir à vendre des albums. J’aurais voulu savoir comment ça se passait pour vous à ce niveau.

Je pense que le premier album est surtout là pour nous faire de la promotion. Je sais que les ventes de disques sont réellement difficiles ces temps. Nous ne vendons pas beaucoup mais pas mal de gens m’ont dit qu’il fallait qu’on soit contents de ce qu’on arrivait à vendre, vu le contexte : au moins on vend. De toute façon, on ne fait pas ça pour l’argent, donc…

- Quelles ont été tes influences ? Tu es née à Séoul, puis tu as vécu à Singapour, et enfin tu es venue en Suisse. Est-ce que tout ceci a influencé ta manière de percevoir la musique ?

Beaucoup de gens voudraient m’entendre dire que ma musique est influencée par les lieux où j’ai vécu dans ma jeunesse, mais tu sais, à Singapour, la scène musicale est inexistante. J’ai grandi en écoutant ce que mon père écoutait : les Beatles, les Stones, je pense que ceci m’a influencée d’une certaine manière. À l’école, il y avait des Allemands qui m’ont fait découvrir des groupes comme Soundgarden, Nirvana, ce genre de choses. Je pense que c’est là que j’ai fait mes découvertes musicales, ma petite révolution interne. Il y a de ces influences dans notre musique.

- Est-ce que tu aimes Coroner ? (La question piège vu que Tommy était juste à côté, tout sourire en attendant la réponse de Nina)

(Rires) Ben heu… j’ai passé les seize premières années de ma vie en Asie ; je n’avais jamais entendu parler de Coroner. Je n’ai découvert ce groupe qu’en apprenant l’existence du studio de Tommy et c’était il y a cinq ans de cela. J’aime beaucoup leur son, mais ce n’est plus d’actualité maintenant. Mais tu sais je n’écoute pas d’anciens albums de Metallica ou des vieux Slayer non plus. Je les aime bien, mais ce n’est juste plus de mon époque.

- Est-ce qu’en tant que producteur Tommy a eu une influence sur votre son, votre musique ?

Ce que j’apprécie vraiment chez Tommy, c’est qu’il n’essaye pas de changer la musique des gens qu’il produit. Il aime plein de styles différents. Il arrive à prendre ce qu’il y a de mieux dans la musique et le transcender.

- Votre reprise live de Lady Gaga m’a réellement surpris. Pourquoi un tel choix ? Tout le monde s’attendait à une reprise de Coroner alors pourquoi diable du Lady Gaga ?

(Rires) Tout d’abord je pense que si tu fais une reprise, il faut qu’elle soit originale au possible. Ça ne sert à rien d’essayer de reproduire un tube tel quel. Regarde notre reprise de Lady Gaga, c’est surtout un énorme gag. On devait jouer un assez long set ce soir, et on n’avait pas assez de morceaux, c’est pour ça qu’on a fait cette reprise. Mais je ne veux pas que ce morceau prenne le pas sur ce qu’on fait avec 69. On avait parlé de faire une reprise de Coroner car ça pourrait être sympa. Mais si on le fait une fois, ce sera d’une manière très différente car déjà on n’arriverait jamais à la faire sonner mieux que l’originale, mais surtout, comme je le disais, pour moi, une reprise doit être quelque chose de personnel, pas juste une copie conforme.

-Je vais te poser la même question qu’à Tommy tout à l’heure. Est-ce que tu n’as pas l’impression que s’il y a eu du monde ce soir, c’est en partie parce que Tommy joue avec vous ? Tu n’as pas l’impression qu’il vous vole un peu la vedette ?

Je vois ce que tu veux dire, mais non je ne pense pas. S’il y a des gens qui viennent nous voir parce que Tommy joue avec nous, c’est cool. Je suis très fière de lui, c’est vraiment un plus pour un groupe de l’avoir, je ne le vois pas comme un concurrent. Je ne me vois pas comme une vraie guitariste. Je joue de cet instrument pour accompagner mes morceaux, simplement. Tommy est un vrai guitariste, lui, il apporte beaucoup au groupe. Il n’y a donc pas de concurrence. En plus, beaucoup de jeunes ne le connaissent pas de l’époque Coroner. En tout cas cela ne nous affecte pas d’une manière négative, c’est sûr.

- J’ai vu dans ma boule de cristal que dans dix ans 69 Chambers sera au top…

Vraiment ? C’est cool (rires) !

- Oui je suis devin, medium, ce genre de choses, maintenant projette-toi dans ce futur et dis-moi comment tu veux que les gens se rappellent de toi : une excellente compositrice, une leader charismatique ?

Question difficile. Je ne pense pas que ce soit à moi de décider. Il y aurait tant de raisons de quitter le monde de la musique. Tout est tellement pourri à l’intérieur, il y a tellement de choses liées à l’argent. Mais je joue de la musique car c’est ce que j’ai besoin de faire et ce qui arrivera arrivera. S’il y a une possibilité de toucher des gens, qu’ils aiment ce qu’on fait, c’est cool. Ce serait un sacré compliment.

- Finalement, tu penses qu’un nouveau groupe comme vous a une chance de pouvoir percer ? Quand on voit les headliners des festivals, Twisted Sister, Kiss et plein d’autres, on ne peut pas dire que les festivals laissent beaucoup d’espace à de jeunes groupes de pouvoir tenir des têtes d’affiche. Le renouveau de la scène metal va être très compliqué à l’avenir, non ?

Je pense qu’il y a deux problèmes principaux. Déjà la scène metal est trop conservatrice, quand tu vois tous ces nouveaux groupes qui copient ce que d’anciens groupes faisaient, comment veux-tu qu’ils percent car ils ne seront jamais aussi bons que les originaux. Et l’autre point est que si tu joues du rock, tu ne peux pas refaire le rock selon moi. Tu peux y apporter une touche personnelle, mais tu ne peux pas le réinventer, c’est gravé, on ne peut pas le refaire. Donc c’est quasiment impossible pour les festivals de ne pas tenir compte de ces groupes idolâtrés. Par contre dans le futur il y aura du renouveau, de nouveaux groupes qui seront suivis par de nouveaux fans et qui feront que ces groupes seront les futurs headliners, mais pas forcément dans les styles que l’on connaît maintenant.

www.69chambers.com

Indy

Interview réalisée le 30 janvier 2010 à Yverdon

mis en ligne le : 22.06.10 par graber

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